
Même s’il est à craindre que Circles [1] passe un peu inaperçu dans le flot des sorties cinématographiques, il n’en demeure pas moins que c’est un des films les plus fidèles dans la description des conséquences sans fin de la guerre civile en en-Yougoslavie. Quand vous lancez une pierre dans l’eau les cercles créés par les vagues d’ondes d’impact sont infinis… Comme les répercussions des atrocités et des actes absurdes perpétrés pendant la guerre civile.

Marko, un jeune soldat serbe, sauve Haris, bosniaque et vendeur de cigarettes sur la place du village de Trebinge, de l’acharnement de trois autres soldats. Il semble avoir calmé le jeu, mais soudain la violence dérape et il est descendu par ses camarades. Mais on ignore tout d’abord la fin tragique de Marko. Tout au long du film et, au fur et à mesure que l’on retrouve tous les personnages du récit dix ans plus tard, le drame revient, comme un fil d’Ariane. C’est le début et le dénouement de toute l’histoire de la région. Et dans cette logique de l’innommable, les personnages se croisent à nouveau, dans des positions de pouvoir inversées.

Dix ans plus tard donc, le hasard fait irruption auprès des proches de Marko et de Haris et leur rappelle que cette tragédie est loin d’être terminée… Le hasard, pas sûr, car la violence se reproduit avec la même absurdité.

Nada, la fiancée de Marko, demande l’aide de Haris pour elle et son fils.
Haris a reconstruit sa vie et a fondé une famille en Allemagne.
Le père de Marko construit une chapelle de pierre dans un coin perdu lorsque le fils de l’un des assassins vient lui demander du travail, malgré l’interdiction de sa mère. L’ami de Marko, qui n’a pas osé intervenir lors de l’altercation entre soldats, est devenu chirurgien à Belgrade. Un jour, il est le seul à pouvoir opérer l’un des responsables de la mort de son ami. Les suites de la guerre civile, les cercles de l’onde de choc qui n’en finissent dans les retombées des situations.

Le film montre avec finesse la brutalité qui couve dans les rapports, les souvenirs trop lourds, les vies gâchées par la violence, le ressentiment et la vengeance. Une manière aussi de confronter la situation et de passer outre les non dits qui recouvrent l’histoire et la réalité de la guerre civile. Pour Srdan Golubovic, le fait réel qui a inspiré le film est une ouverture pour engager une nouvelle analyse de la situation et aller au-delà.
« En 2007, quand j’ai lu l’histoire de Srdjan Aleksic, je me suis rendu compte que c’était une des seules histoires positives qui soient ressorties des guerres meurtrières qui ont secoué l’ex-Yougoslavie. Que ce geste est la somme de tout ce que je ressens par rapport à cette période des années 1990. Il est devenu mon héros personnel, recouvrant ma représentation de l’humanité et du courage. »

Un film sur le pardon ? C’est beaucoup plus complexe. Circles de Srdan Golubovic est une analyse de la violence engendrée par la militarisation et de ses répercussions.