
Au sein du collectif de rédaction de Refractions qui est, comme on le sait, composé d’individualités aux orientations
libertaires les plus diverses, nous avons rencontré des
conflits qui ont fait surgir l’idée de consacrer à ce phénomène, et au
traitement original dont il pourrait bénéficier chez les libertaires, un
numéro de notre revue. L’histoire même de Réfractions est traversée
de heurts, dont certains ont conduit au départ de membres du collectif
et qui chaque fois posent la question de savoir ce qui l’emporte,
du stimulant et du mortifère, du constructif et du destructeur.
Par ailleurs, nous savons, par les liens qui nous unissent avec
le milieu libertaire, que celui-ci est régulièrement traversé par des
différends plus ou moins profonds, notamment dans les organisations
qui le structurent, de sorte que nous en sommes arrivés à
nous dire que les questions que nous nous posions à ce propos
pouvaient être partagées plus largement.
Il est vrai que les conflits, ce n’est pas seulement ce qui traverse
un collectif, et il y aurait peut-être lieu de distinguer le conflit
externe (ce contre quoi les libertaires sont en conflit : le capitalisme,
l’État, le patriarcat, et plus généralement toutes les formes de domination)
du conflit interne (celui qui peut les diviser), et en tout cas
de se demander si, dans leurs théories et dans leurs pratiques, les anarchistes développent à cet égard une conception et une attitude
singulière.[…]
Ce qui nous a semblé ressortir de cette confrontation, c’est que
toute vie collective est traversée de conflits, pour lesquels se pose la
question de leur caractère moteur ou paralysant. Qu’on le dise pour
les célébrer ou parce qu’il faut bien vivre avec, les conflits, c’est la
vie… [1]