Christiane Passevant
Serge Utgé-Royo en concert au Vingtième théâtre
9 avril 2013
Article mis en ligne le 10 juin 2013
dernière modification le 11 avril 2013

par C.P.

L’espoir têtu…

Léo Nissim (piano), Jean My Truong (batterie), Jack Ada (guitares), Jack Thyssen (basses), David Venitucci (accordéon), Gérard Carocci (percussions) et Cristine Hudin (présentation et chœur).

Serge, tu as écrit un jour, dans une postface — drôle de mot pour un billet d’amitié —, que la chanson « sert de petits cailloux blancs dans l’histoire des luttes, des interpellations du peuple aux tenants de la force, des espoirs en des lendemains plus beaux, plus heureux », et tu ajoutais qu’il fut un temps où « les chants humains faisaient partie de l’essentiel ». Un temps où les luttes étaient plus ardentes et peut-être moins facilement détournées par la propagande officielle et ses avatars.

Détournées… Voilà un mot qui nous est cher lorsqu’il s’agit de chansons engagées et subversives. Car le détournement des chansons et des mélodies au détour d’une manifestation, d’une revendication, d’une lutte ou d’un cri s’élevant contre le pouvoir, fait preuve d’imagination tantôt poétique, tantôt ironique ou facétieuse, et témoigne de la créativité populaire lorsqu’il est question de changer des règles imbéciles et d’exprimer le désir d’un autre monde, plus égalitaire et plus juste.

Si actuellement l’esprit critique a tendance a être marginalisé, si la chanson hors des clous de l’art normé et exigeante de beaux textes semble écartée la plupart du temps des hit parades et autres playlists bidonnées par les majors, comme on dit, tu demeures, Serge, avec quelques autres, un auteur compositeur interprète qui a des choses à dire et qui les dit avec talent et conviction. Semer les petits cailloux blancs de l’utopie et de la mémoire des luttes dans un espace culturel enrégimenté par le fric et le copinage n’est pas toujours facile, non plus que d’assumer et défendre un
« espoir têtu ». Il en est de même pour les principes libertaires et la volonté de réaliser ce que l’on sait le mieux faire… En ce qui te concerne, Serge, écrire et chanter.

Alors que te dire, sinon merci d’être là avec tes mots et tes chants,
merci pour cet « espoir têtu », pour le « navire éphémère coulant dans le temps » et tanguant sur une planète bien fragile, pour la réappropriation que tu nous offres des chansons de Léo Ferré, pour les Contrechants de ta mémoire des luttes et des utopies, pour un projet futur, que j’espère proche, de chansons détournées. Merci de la part de ceux et celles — et je crois que leur nombre va croissant —, qui ne renoncent pas, mais qui
« espèrent, luttent, se moquent, se dressent, souffrent, apostrophent, en appellent à l’avenir, exigent le bonheur, rien que ça. »