Un amour de la route. Lettres à Simone de Beauvoir août-octobre 1958. Blossom Margaret Douthat
Préface de Philippe Lejeune (éditions du Mauconduit)
Article mis en ligne le 27 mars 2020

par C.P.

Un amour de la route
Lettres à Simone de Beauvoir août-octobre 1958

Blossom Margaret Douthat
Préface de Philippe Lejeune (éditions du Mauconduit)

Le 3 juin 1958, Simone de Beauvoir reçoit un cadeau hors du commun : le journal manuscrit (8000 pages) de Blossom Douthat, une étudiante états-unienne, admiratrice de l’œuvre de Sartre et de la sienne. Elle note dans son propre journal : « Joan (c’est le pseudonyme qu’elle lui donne) a déposé chez la concierge les dix-huit volumes de son journal. Intéressant, malgré le fatras, ce journal, parce qu’elle s’y livre sans réserve. En général, les journaux intimes me fascinent, et celui-ci est assez extraordinaire. » (La Force des choses, Gallimard.)

Simone de Beauvoir rencontre ensuite la jeune femme à plusieurs reprises et lui conseille d’écrire de façon plus distanciée. En guise de réponse, Blossom lui envoie pendant l’été 1958 cinq immenses lettres qui relèvent à la fois de la correspondance, du journal et du roman. Ce sont ces lettres que publie Mauconduit sous le titre Un amour de la route. Avec une liberté absolue, Blossom y raconte sa virée en autostop de Paris à Milan et son projet de coucher avec qui lui plaira, « sans me retenir, mais sans m’attacher ». Un choix qu’elle ne parviendra pas à assumer : elle tombe sous le charme d’un camionneur, Raymond le Niçois, la quarantaine, communiste (elle ne couche qu’à gauche !), qui va la mener en bateau tout l’été.

Simone de Beauvoir rapprochait l’écriture de Blossom à d’autres écrits comme ceux de Violette Leduc. • Le style de Blossom : son étonnant franc-parler pour l’époque, son art prodigieux du ralenti et du suspense, sa tentative d’œuvre littéraire entre autobiographie et fiction souligne l’étonnante actualité de ce texte écrit il y a plus de soixante ans, en matière d’émancipation féminine et de vie sexuelle. S’ajoute l’aspect inédit et romanesque de cette correspondance « extravagante » comme la définissait l’auteure du Deuxième Sexe.