Jésus
Film de Hiroshi Okuyama (25 décembre 2019)
Avec Yura Satô, Hinako Saeki, Riki Ôkuma, Chad Mullane, Keni-chi Akiyama.
Yura déménage avec ses parents chez sa grand-mère peu après la mort de son grand-père. Scolarisé dans une école catholique, il fait deux rencontres essentielles : Kazuma et… Jésus qui réalise ses vœux. Un conte savoureux et dramatique sur le deuil, la foi et l’amitié.

Résumé : Yura Yoshino et ses parents quittent Tokyo pour s’installent chez la grand-mère du petit après le décès du grand-père. Yura est aussitôt scolarisé en CM1 dans une école catholique. Seul et désorienté, il s’imprègne de l’atmosphère lors des prières au point de voir apparaître Jésus (en tout petit). Il lui demande de lui accorder un ami. Aussitôt, au détour d’une poule qui s’est échappée dans la cour, il fait la connaissance de Kazuma Okuma. Les jours s’écoulent pour Yura entre visions, amitié, cours et dîners familiaux. À sa demande, Jésus lui offre un billet de 1000 yens qu’avait caché son grand-père. Lui et Jésus, qu’il est seul à voir ne se quittent plus.
Yura passe Noël avec Kazuma et sa mère dans une maison perchée sur un arbre. Un jour, ils vont prier dans un temple bouddhiste au cœur de la forêt. Peu après, alors que les cours ont repris, Yura quitte l’école lors d’un match de foot. Puis Kazuma est victime d’un terrible accident de la route. Yura demande à Jésus de l’accompagner à l’hôpital. Jésus obtempère. De la chambre, Yura entend la mère de Kazuma reprocher par téléphone au père de ne pas venir. Puis Jésus ne lui apparaît plus. Kazuma meurt malgré les prières de ses professeurs, prêtre et camarades. Chargé d’écrire et prononcer la prière d’adieu, Yura voit de nouveau apparaître Jésus durant son hommage. Il l’écrase de la main. Dans sa chambre, jadis occupée par son grand-père, il troue la fenêtre en papier, regarde dehors et voit Kazuma. Il le rejoint pour jouer au foot.

Un film magnifique, dont la ludique mais respectueuse irrévérence est à la dimension de la profondeur de sa réflexion quasi métaphysique. Par delà la solitude et le deuil d’un enfant, c’est en effet aux moyens de « voir” l’Invisible que s’intéresse Hiroshi Okuyama, “in memoriam d’un ami trop tôt disparu”. Au comment des rites mécaniques imposés par l’Institution et relayés par les croyants (joindre les mains, fermer les yeux, etc), il substitue l’imaginaire et l’intelligence du cœur, celle-la même que Salomon demandait à Dieu de lui accorder. Ce Roi à qui l’on doit le célèbre “Vanité, tout n’est vanité”, mot qui se dit Ruah en hébreu, à savoir souffle.

Or, par deux fois, alors qu’il veut regarder dehors, Yura obstrue son regard avec sa buée. Raison pour laquelle il finit par trouer le papier de la fenêtre, à l’instar de son grand-père, accédant ainsi à la vision (céleste ?) de son ami et s’imaginant en train de jouer de nouveau au foot avec lui. De la même façon, le réalisateur multiplie-t-il malicieusement les séquences où, en gardant les yeux ouverts lorsqu’il prie, Yura “voit” Jésus (ami transitionnel) contrairement à ceux qui l’entourent, dont le prêtre. Faut-il “voir” dans ce juste rappel à l’intériorité le fait que les espaces privés sont de couleur chaude (ocres, bruns) tandis que la nature enneigée et les classes sont d’un bleu réfrigérant ? Tout aussi subtilement,
Okuyama glisse quelques piques sur la condition de la femme, mère abandonnée avec son enfant mourant ou dédiée à préparer les repas. Assurément, un vrai beau film. Ne surtout pas rater le générique de fin où l’humour d’Okuyama trouve son “apothéose”.
Sur les écrans le 25 décembre.