
1973
Jean-Pierre Levaray (ACL—Atelier de Création Libertaire)
1973. Début d’un bail de quarante-deux ans en usine… C’est pas rien et ça compte ! Surtout pour quelqu’un qui n’avait pas vraiment prévu d’y rester si longtemps en usine.
Et même si l’usine ne manque pas à Jean-Pierre Levaray, depuis qu’il n’y travaille plus, le voilà qui se remémore ses débuts dans la boîte où il pensait ne rester qu’un moment, n’y faire qu’un passage. Cela a duré plus de quatre décennies, Quand même, ça fait un drôle de bail ! Alors il a repris la plume pour « se pencher sur cette période qui a entraîné le reste de [sa] vie. » Une période « qui m’a fait être ce que je suis aujourd’hui », écrit-il.
« C’est un exercice étrange que de faire revivre ses souvenirs. Moi qui essaie de ne pas me tourner vers le passé, parce que c’est fini et que ça me flanque le bourdon, voilà que je me prête à cet exercice et que les images reviennent. Qu’est-ce qui me prend ? Est-ce que c’est parce que j’ai quitté l’usine et que j’ai envie de réfléchir sur mon entrée dans la vie active et ce qui l’a précédée ? Plus de quarante ans se sont écoulées, il m’est arrivé des tas d’autres choses. Alors pourquoi ? Est-ce parce que je vieillis ? »
Et les images reviennent, celles des profs, de la trentaine d’élèves, les copains, les cours, les filles, le labo…
1973. Juste après la révolution ratée de mai 68, il y a les mouvements étudiants… 1973, ce sont ses premières manifs… Les discussions, la prise de conscience… Une chronique de lutte lycéenne qui se conclut avec le dernier été de liberté…
Septembre 1973, c’est l’entrée à l’usine.
Putain d’usine ! « Pas de quoi rigoler. [et d’ajouter] Heureusement, la révolution n’est pas loin. Les Lip nous montrent la voie. Bientôt on arrêtera tout, on réfléchira et ce ne sera pas triste. »
« Il y a plus d’une quinzaine d’années j’ai écrit Putain d’usine et l’accueil a été très bon. Ce livre a changé ma vie, m’a fait rencontrer de nombreuses personnes, m’a fait voyager, m’a fait côtoyer des dessinateurs, théâtreux, cinéastes, libraires, auteurs et j’en passe.
Une autre vie en parallèle au travail et à l’usine. J’ai écrit d’autres livres, pièces de théâtre, bandes dessinées. Toujours sur le travail, les usines, les prolos, les patrons. Il aurait été possible qu’une fois sorti de l’usine, la source se tarisse. Peut-être. Pourtant, je reprends la plume. À la faveur de lectures, à la faveur de réflexions, voilà que je me suis mis à me remémorer de vieux moments, ceux de mon entrée à l’usine.
Époque, justement, au cours de laquelle je pensais ne pas rester à l’usine si longtemps. Je ne suis pas adepte des jeux de mémoire, je préfère profiter du temps présent, mais ce texte s’est imposé. C’est peut-être ça aussi vieillir ? »
Les flask backs d’une année pas comme les autres et un retour aux traces du passé…

1973 de Jean-Pierre Levaray, on retrouve un pote en attendant qu’il écrive un autre opus, dans le genre Tue ton patron.