Shut up and Play the Piano
Film documentaire de Philipp Jedicke (3 octobre 2018)

Pour son premier long métrage documentaire, Shut up and Play The Piano, Philipp Jedicke a choisi l’artiste, le compositeur, le performeur Chilly Gonzales. Il est vrai que celui-ci, qui d’ailleurs refuse de jouer à « l’artiste », est étonnant, voire déconcertant, pour son exploration de nombreuses formes musicales et son attention à casser les codes habituels de l’industrie du spectacle. Le résultat est passionnant.
« J’aimerais faire un film sur vous » lui déclare Philipp Jedicke, qui est journaliste, à la suite d’un entretien avec Chilly Gonzales, Gonzo comme on l’appelle le plus souvent. Et l’aventure commence, une plongée et une enquête dans les archives musicales de différents groupes, des rencontres, des concerts, bref un boulot dingue pour trouver non seulement la structure du film, mais aussi monter un récit d’images et de sons, qui soit fluide, sans pour autant s’enfermer dans une chronologie classique.
Shut up and Play The Piano (autrement dit ferme-la et joue du piano) n’est pas une biographie musicale, non, c’est le parcours créatif d’un musicien en recherche perpétuelle de partages pour transcender les genres, aller au-delà et s’éclater. Un parcours surprenant, inclassable, atypique, qui va du punk au rap, de l’électro au classique, toujours afin de surprendre et d’explorer la musique autrement… Véritable comédien exalté sur scène, Chilly Gonzales dégage une énergie telle qu’il accapare l’attention du public et va là où on ne l’attend pas. Il parle d’expérience : « on apprend des choses en les faisant ».
Pianiste virtuose, punk mégalo quand il débute sur la scène berlinoise, cet artiste canadien refuse les étiquettes, toutes les étiquettes, et collabore avec de nombreux groupes, notamment les Peaches. « J’ai d’abord hurlé [dit-il avec humour] pour attirer l’attention et voilà qu’en me taisant… j’y arrive… » On n’est pas au bout de l’étonnement avec Chilly Gonzales. C’est certainement une personnalité complexe qui confie au réalisateur, « écoute les paroles de mes chansons, tout est là… » Il fallait donc partir du personnage de la scène pour comprendre qui est véritablement Gonzo : « Mon film, explique Philipp Jedicke, part de l’artiste Chilly Gonzales et lève progressivement le rideau pour découvrir Jason Beck, [cependant le film] demeure un voyage à travers ses fantasmes, dans son cerveau, mais aussi dans sa carrière. Au final je crois qu’on y découvre des aspects très différents de son travail et de sa personnalité. »