− Vous savez, je n’ai pensé qu’à une seule chose : empêcher le volant de m’enfoncer la cage thoracique. J’y ai mis toute mon énergie. C’est totalement dérisoire. C’est fou à quoi on peut penser dans des moments pareils.

− Oui... Vous avez sûrement évité d’avoir la cage thoracique enfoncée.

Il y a des voitures neuves dans le hall d’exposition, qui brillent. Le garage est derrière moi, les portes ouvertes, avec d’autres voitures en réparation.

− Mais quel rapport entre ma force et celle de cette tonne de ferraille ?

− En repoussant le volant, vous vous êtes protégée.

C’est un professionnel, il doit savoir ce qu’il dit. Ou bien il essaie de me rassurer, plutôt de donner du prix à ce que j’ai cherché à faire.

− Mais je ne peux pas être plus forte que cette masse de fer et de plastique et de sièges et de moteur !

− Si. Vous avez empêché le volant de vous écraser ; c’était un bon réflexe, efficace. Vous ne seriez pas là sinon.

C’est un peu le même ton qu’avait eu l’épaviste, le regard fixe : « Si vous aviez eu une autre voiture, une voiture plus petite, nous ne serions pas en train de parler vous et moi. »

Je veux une autre voiture, mais le même modèle. Nous sommes lundi ; l’accident c’était avant-hier. J’essaierai une nouvelle voiture mercredi. Elle n’est pas encore prête, mais j’ai le choix entre trois voitures, et je pense que je sais déjà laquelle je prendrai. Je reviendrai mercredi matin, pour l’essayer.

− L’un des pompiers a trouvé du gasoil sur la chaussée, sur des mètres et des mètres.

− Il y a eu plusieurs accidents sur ce tronçon à partir de 10h du matin. Nous le savons par différentes personnes. Des amis sont allés à Marseille faire des courses l’après-midi, et il y avait des panneaux sur dix kilomètres environ.

− Mais les gendarmes n’ont rien fait !

− Ils se sont décidés à mettre des panneaux un peu plus tard. Il y avait déjà eu plusieurs accidents.

− Oui, j’ai vu ça à la clinique... Aux urgences, ils ne m’ont même pas fait un scanner du cerveau ; et moi je n’ai pas pensé à le demander.

− Tout le monde veut éviter les ennuis.