
Filmer pour ne pas oublier… Une belle manière de raconter le film documentaire de Régis Sauder, Retour à Forbach. Voilà trente ans que Régis Sauder est parti de cette ville minière de la Moselle, sa ville natale partagée entre la France et l’Allemagne durant des décennies.

C’est un bassin houiller surexploité avant et pendant les trente glorieuses, puis abandonné pour aller exploiter ailleurs… Le profit décide. Le résultat… Des boutiques fermées, un sous-sol creusé sans se préoccuper des conséquences, des bâtiments fissurés, des effondrements et la population qui, pour une bonne partie, se sent lâchée… « C’était ma cité. [dit l’un des témoins dans le film] Aujourd’hui, je vois un désert. C’est un gâchis ! »

Forbach, ville frontalière, dont on ne dit pas l’histoire, parce qu’elle est confuse et qu’on ne sait plus très bien quel était le bon côté à choisir au moment de l’Occupation. Laisser la mémoire s’effacer ou jouer au mal de l’époque, la quête identitaire. Régis Sauder questionne le passé qui s’estompe, celui de la ville occupée par les nazis où la population était divisée.

Faire un film, c’est raviver la mémoire, essayer de comprendre et écouter ceux et celles qu’il a connu.es, les autres aussi, au fil des rencontres… « Voter nationaliste, c’est voter la guerre. C’est revenir aux années trente ! » dit l’un de ses amis qui exprime son inquiétude. Le plus important n’est finalement pas de dénoncer la montée du Front national ou le racisme, c’est de montrer les gens qui habitent la ville et en font la diversité, c’est écouter le mal vivre s’exprimer, la résistance aussi de celles et ceux qui croient à la richesse de cette diversité. Et puis, Forbach a toujours été une ville d’accueil et « la génération actuelle réfléchit, elle ne se laissera pas faire ».

La maison familiale de Régis Sauder est vendue comme on tourne une page et l’enfant à la fenêtre de sa chambre, c’est l’image de la transmission et de quelque chose d’autre qui commence…
Un formidable documentaire !
